Depuis plusieurs années, l’ancien lycée Anita-Conti tombe en ruines. Pour combien de temps encore ?
Dans le quartier du Perrey, autour de la rue des Sauveteurs et de la rue des Moulins, le ras-le-bol des riverains est palpable. Délavé, le panneau du permis de construire est devenu illisible au fil des années. La situation semble au point mort. Dans le quartier divisé entre les pro et les anti-projet, on se lamente autour de cette « Arlésienne ».
En novembre 2011, après que la Région, propriétaire, eut vendu le site à un promoteur, la Ville accordait un nouveau permis de construire validant le projet d’un hôtel de luxe et de logements de standing en front de mer, sur le boulevard Clemenceau. La version 2 du maître d’ouvrage Cirmad Prospectives (filiale du groupe Bouygues Immobilier) avait tenu compte de l’avis de certains habitants qui craignaient de perdre leur vue mer. Par rapport au projet initial, l’immeuble perdait un étage. Cela n’a visiblement pas suffi à calmer les esprits. Réunis en association, Les Riverains du Moulin du Perrey, les opposants ont continué à « casser » le dossier en multipliant les recours auprès du tribunal administratif.
Une urgence
Ces irréductibles maintiennent la pression pour que l’hôtel ne puisse sortir de terre au risque de perdre leur vue mer et « pour ne pas laisser le front de mer aux mains des promoteurs ». Quant à l’argument à un moment évoqué d’une éventuelle perte de tranquillité avec l’implantation de l’établissement l, il ne semble plus tenir par rapport à l’actuelle situation.
L’ancien lycée est devenu une véritable verrue, squattée et vandalisée. Incendies, bris de vitres, actes de vandalisme : l’endroit est devenu malfamé. Les troubles à l’ordre public et nuisances se multiplient. « De ma fenêtre, je vois passer les squatters », dénonce un riverain. Édouard et Mathilde, les patrons de la brasserie Les Embruns, sont aux premières loges pour entendre les plaintes des habitants du quartier. Eux-mêmes sont aussi concernés. « Dans le quartier, il se dit que rien ne sera fait avant fin 2014, voire début 2015. Il faudrait que quelqu’un prenne la décision de détruire le bâtiment. C’est une ruine qui fait tache sur le front de mer. Ça ne fait pas honneur à la Ville du Havre », maintient Édouard. Même son de cloche pour Alan, un voisin, qui se plaint de la saleté. « Il faut raser l’existant et faire quelque chose de propre. » La plupart ont conscience que seul un projet immobilier fera évoluer les choses.
Pas de calendrier possible
Pour la Cirmad, le promoteur immobilier qui défend les intérêts du bénéficiaire, la SARL CLH « La Closerie », avec qui la Région a signé une promesse de vente, le projet est toujours bloqué. « Pour nous, suite aux différents recours, le dossier n’a pas évolué depuis 18 mois ». Pas question dans ces conditions d’avancer un calendrier, la prudence semble de mise tant pour le promoteur que pour la Région. L’urgence est tout de même gérée. Édouard Philippe a récemment interpellé le président de la Région sur les actes de dégradation récurrents sur le lycée. « Ces faits engendrent des troubles manifestes à l’ordre public et de nombreuses nuisances dans le quartier, qu’il s’agisse de propreté et de sécurité », a écrit le maire du Havre. Alain Le Vern s’est empressé de répondre que le bénéficiaire de la promesse de vente s’est engagé à régler les frais occasionnés par le maintien en sécurité du site jusqu’au transfert de propriété notamment en bloquant les accès détériorés. Le nettoyage des toitures terrasses et de la cour est aussi programmé.
La Ville voudrait pourtant que le projet finisse par voir le jour. Un hôtel 4 étoiles compléterait l’offre aujourd’hui trop réduite au Havre dans cette catégorie. Seul le Pasino offre ce niveau de luxe. En front de mer, le nouvel établissement doit permettre de répondre aux attentes de la clientèle. Le projet se veut valorisant pour le bord de mer, avec des retombées sur l’ensemble de la ville.